CR Conseil Municipal - 03 février 2025
Ce premier conseil municipal de l’année 2025 a été marqué par des débats animés autour de trois dossiers majeurs, dans une atmosphère une fois de plus tendue. La majorité semble éprouver des difficultés à accepter notre regard sur leurs projets, alors que le rôle des élus minoritaires est précisément d’analyser et de questionner les propositions, garantissant ainsi un débat démocratique essentiel.
Pour la lecture intégrale de nos interventions sur le PLU cf la fin de ce document.
Pour résumer :
- Rapport d’orientation budgétaire pour 2025 : Un budget sous forte contrainte, marqué par de nombreuses incertitudes financières. Des investissements conséquents, qui gagneraient cependant à être davantage orientés vers les besoins de la population. Des lacunes persistantes en matière de mobilités douces. Enfin, un effort annoncé – que nous réclamions de longue date – sur la gestion des ressources humaines, afin de limiter une augmentation, certes progressive, mais constante du nombre d'agents municipaux.
- Approbation de la révision du Plan Local d’Urbanisme : Le PLU a été adopté. Cette révision apporte indéniablement des améliorations par rapport au document précédent. Toutefois, de nombreuses imperfections et incohérences ont été relevées dans les diagnostics, notamment l'absence de mise à jour de documents essentiels, tels que ceux relatifs au climat et aux nuisances sonores, des enjeux trop souvent négligés. On observe également un manque de précisions sur certains aspects, tandis qu’une surabondance d’informations sur d’autres nuit à la transparence attendue.
Nous retenons les points suivants :
o Des améliorations concernant les haies, les parkings végétalisés, les zones naturelles, des fiches patrimoines mieux détaillées.
o La santé ne fait pas partie des enjeux majeurs alors que la population manque déjà de médecins et que la population vieillit.
o La centralité de Thony, qui se veut un élément essentiel du dispositif souffre de l’absence de ligne directrice sur la place du commerce dans la ville et du manque de vision globale sur les flux de véhicules.
o Une typologie des logements en contradiction avec la volonté de garder les familles puisque les grands logements (T5 et T4) sont en diminution.
o Une mise en œuvre complexe avec des OAP multiples.
o Des annonces déjà faites sur la mobilité et sans vision globale. Pas d’anticipation des mobilités futures, aucune réelle stratégie sur les stationnements..
o Les fiches patrimoines n’englobent pas de périmètre élargi.
o L’OAP sur les commerces et l’artisanat est symptomatique d’une liste de vœux pieux répétés partout, sans réflexion, alors que le commerce et l’artisanat nécessitent une stratégie concertée et spatialisée.
- Création d’une société d’économie mixte locale (SEML) de restauration collective : une délibération entachée d’erreurs, qui augure mal de la rigueur nécessaire à la gestion de ce dossier. À titre d’exemple, on peut lire : « … initialement constituée de quatre actionnaires publics et privés », alors que le tableau correspondant ne mentionne que deux actionnaires (la Ville d’Évian et le partenaire privé). L’idée de ce projet est louable : mieux nourrir nos enfants avec des produits de qualité. Une belle ambition, mais quel dommage ! La transition écologique, pourtant essentielle dans un projet de cuisine centrale, n’apparaît qu’en perspective lointaine. De plus, ce projet n’est pas conçu pour être équilibré dès le départ, puisqu’il repose uniquement sur la commune d’Évian. Pourquoi ne pas avoir retravaillé le projet initié au sein de la CCPEVA avec les communes intéressées, afin de garantir un équilibre économique dès le lancement ? Évian considère les autres communes comme de simples clientes, et non comme de véritables partenaires. Certes, les risques restent limités, mais le modèle économique de l’entreprise est unanimement reconnu comme fragile, voire déficitaire par manque de débouchés. Avec un coût du repas environ 40 % plus élevé, comment être certains que d’autres communes rejoindront le projet à l’avenir ? D’autres interrogations demeurent, notamment sur la séparation des rôles, la mairie étant à la fois autorité délégataire et actionnaire de la SEML. Il a été proposé de réserver un siège à l’opposition (@IsabelleLang y siégera), une disposition qui aurait mérité d’être formalisée dans le document.
Malgré l’intérêt évident d’un projet que nous appelons de nos vœux depuis longtemps, il nous est difficile de donner un blanc-seing au montage actuel. Nous avons demandé la mise en place des conditions nécessaires à un modèle économique viable, afin d’éviter un déficit dès le départ, dont les Évianais paieraient inévitablement le prix. Quel regret que ce projet n’ait pas fait l’objet d’une véritable co-construction, tant au sein du conseil municipal qu’avec les communes voisines.
Les interventions sur le PLU
Approbation de la révision du Plan Local d’Urbanisme
En juin 2024, lors de la présentation de la révision du PLU au conseil puis dans la tribune que vous avez publiée, il a été affirmé que cette révision du PLU avait fait l’objet d’un « consensus en commission municipale » :
Pour rappel, nous n’avons jamais exprimé un « avis consensuel », c’est-à-dire une unanimité ou un accord général. Nos réflexions et nos demandes d’explications dans les commissions ne signifient pas qu’il y ait eu consensus.
Les documents qui sont remis en commission sont préparés et rédigés, en amont, par les élus de la majorité, les services techniques et le cabinet qui a été choisi pour accompagner la mise en place de cette révision du PLU, sans que les élus minoritaires soient présents. Donner des documents à relire, commenter, annoter, sans avoir participer au travail amont ne permet pas d’avoir un regard efficace, ni même objectif à des non spécialistes. Donc il n’y a pas eu de « consensus en commission »
Il est aussi important de préciser que ce PLU n’a pas été « élaboré avec les habitants » comme vous l’avez mentionné.
Les réunions de présentation et les ateliers dits participatifs ne sont pas des instances de prise de décisions qui permettraient d’utiliser le terme « élaborer ».
Nous avons donc analysé l’ensemble des documents que vous nous avez fournis lors du conseil de juin 2024 et nous allons vous en livrer quelques commentaires.
Depuis, un nouveau document a été produit, prenant en compte les remarques des personnes publiques associées et du public. Nous n’avons matériellement pas eu le temps de confronter avec rigueur cette nouvelle version avec l’ancienne.
La révision du PLU est engagée depuis 2020, l’enquête s’est terminée le 08 novembre, vous nous donnez moins de 8 jours pour analyser l’ensemble des documents qui ont été révisés. Vous conviendrez que l’exercice est quasiment impossible.
Notre intervention est le résultat d’un travail d’analyse réalisé avec le groupe conduit par Isabelle Lang qui viendra donc compléter mes propos.
Tout d’abord il me semble important de rappeler qu’un bon PLU ne peut être basé que sur un bon diagnostic, un état initial actualisé et une vision prospective de qualité.
Or malgré les commentaires de certains relecteurs sur la qualité du document, il est dommage que ce travail préalable et nécessaire n’ait pas été fait avec rigueur.
Plusieurs éléments ne manquent pas de surprendre le lecteur. Je vais reprendre les différentes rubriques :
Commerces et tourisme
Par ailleurs, comme « propositions d’enjeux », il est rappelé de maintenir l’offre commerciale au centre-ville sans que ne soit mentionné la nouvelle centralité à Thony (ce projet sera analysé plus en détails ensuite par Isabelle), ni les autres commerces des autres zones.
Il manque donc une réflexion approfondie sur une réelle stratégie d’implantation des zones de commerces à Evian : cette révision du PLU se résume à en mettre un peu partout sans véritable consistance, ni cohérence.
De même par rapport au tourisme, en lien avec les secteurs d’activités de la restauration et de l’hôtellerie, les « propositions d’enjeux » mettent bien en avant la nécessité de « Préserver l’attractivité patrimoniale et environnementale de la commune » et de « Protéger les hôtels et les structures hôtelières » mais n’affichent pas d’objectif sur l’évolution du nombre de lits chauds et la nécessité de réguler, en nombre et/ou spatialement les logements de type Airbnb, alors que cette problématique est devenue majeure.
Les données sur la population.
La population Evianaise a continué à voir sa population vieillir, le problème de l’implantation des jeunes ménages restant identique à la période précédente et est grandement liée à un problème de logements peu adaptés et trop chers. Les jeunes ménages fuient la ville et le turn-over des habitants s’amplifie : 60 % de la population est là depuis moins de 10 ans, et par exemple en 2022, 880 nouveaux arrivants pour 864 départs…Signe d’une mauvaise adéquation de l’offre avec les attentes de la population.
On peut donc dire que l’offre actuelle de logement ne correspond pas à la demande et qu’il faudrait maintenir une offre d’appartements de grandes tailles, notamment pour la location sociale. Des études récentes montrent qu’une famille sur cinq vit avec trois enfants ou plus au domicile, phénomène lié à la multiplication des familles recomposées plus grandes.
Pourtant dans ce PLU, et au contraire de ces constats, il est proposé une quasi disparition des T5 (de 18,5 % à 5 %) et une baisse des T4 (21 % à 20 %) pour favoriser les T2 (de 24 à 30 %) et les T3 (de 30 à 45 %). Il faut noter qu’on élimine au passage les T1, pourtant indiqués comme sous représentés dans le diagnostic (p. 45).
Est-ce que favoriser uniquement les T2 et T3 va permettre l’implantation des familles mais surtout leur maintien ? Vous nous permettrez d’en douter.
Quant aux T4, T5, nous avons bien conscience du prix élevé de ce type d’appartements mais ne serait-il pas pertinent de continuer à en proposer, en mettant en place, par exemple, des mécanismes comme le bail réel solidaire (BRS) pour faciliter l’accès à la propriété de ce type d’appartements ?
Faire disparaitre les T1 pour lutter contre les logements saisonniers est une option pénalisante pour les jeunes et les personnes seules. Certaines municipalités agissent pour limiter ces logements saisonniers et mettre en place des moyens efficaces pour conserver les locaux.
Enfin, les « propositions d’enjeux » indiquent qu’il faut favoriser la mixité sociale et l’arrivée d’habitants plus variés. Donc plutôt que de se focaliser sur les T2 et T3, il aurait fallu au contraire mettre en place des typologies permettant de développer des logements de type différents. Nous n’avons rien noté dans ce nouveau PLU, sensé définir les orientations pour les 10 prochaines années, en termes par exemple d’habitations intergénérationnelles.
Quant aux moyens envisagés pour je cite « tenter d’enrayer le phénomène de desserrement galopant des ménages » que vous pointez comme dommageable, nous sommes curieux de voir quelles solutions pourraient être proposées par la municipalité….
Equipements publics.
Vous dites qu’il sera nécessaire de les valoriser. Nous sommes ravis de voir que ces éléments sont précisés dans ce nouveau PLU.
Espérons donc qu’ils seront enfin à la hauteur des besoins de la population puisque nous déplorons trop souvent le manque de trottoirs, de pistes cyclables dignes de ce nom, mais aussi de nombreuses voiries souvent en piteux état.
Dans les choses qui nous ont surprises, il faut noter que le Cinéma Royal a vu sa capacité plus que doubler, étant gratifié de 324 places pour 121 places réelles !
La consommation d’espace.
Nous avons bien pris en compte les modifications que vous avez faites dans cette nouvelle version en ce qui concerne la consommation d’espace.
Cependant, avec un espace disponible limité et réglementé, un objectif de zéro artificialisation nette, la question va forcément se poser dans le futur autour de la hauteur des bâtiments.
Est-ce que certaines zones n’auraient pas dû être identifiées comme étant propices à une augmentation de la hauteur, en particulier lorsque la pente est très forte et qu’il n’y a pas de dégradation des perspectives visuelles ? La question n’est pas abordée dans ce PLU qui nous engage pour plusieurs années, c’est regrettable.
Nous avons bien noté que vous aviez « fait le choix de ne pas revoir les hauteurs en respect avec l’impact visuel sur le côté en lien avec les enjeux de la loi Littoral ». Phrase qui mériterait d’être plus clair.
La santé
Nul ne peut nier que l’offre s’est dégradée, puisqu’il est indiqué qu’il n’y a plus que 3 médecins généralistes à Evian contre 6 en 2019, malgré un Pôle qui se devait d’être attractif et malgré des promesses maintes fois répétées : « nous avons des pistes sérieuses d’installation ».
Une absence de volonté politique puisque dans les propositions d’enjeux aucun rappel de cette problématique n’est fait !
Pourtant cette absence d’offres de soins touche quotidiennement la population et pénalise gravement les nouveaux arrivants et alors même que d’autres communes voisines ont réussi !
Concernant l’emploi
Tout va bien sur notre territoire puisqu’il est déclaré que le territoire est créateur d’emploi tout en indiquant sur la même page qu’entre 2009 et 2020, 185 emplois ont été perdus sur Evian.
Est-ce que le diagnostic est bon ? Nous nous interrogeons.
En tout état de cause, une analyse plus approfondie serait nécessaire dans un contexte local où l’attractivité se résume le plus souvent à celle pour la Suisse voisine.
La mobilité
C’est un enjeu important de notre quotidien et donc du PLU. Les chiffres parlent d’eux-mêmes avec la place du vélo pour se rendre au travail de 0,6 %.
De plus nous relevons :
- Des informations sur les lignes de bus qui n’ont pas été actualisées malgré le nouveau réseau E’VAD (on en est encore aux lignes H, J, L…).
- Une offre de stationnement décrite comme grandissante (p. 83) alors que depuis plusieurs mois, les places de parking en surface sont plutôt en diminution
- Et une absence de vision réellement prospective, ni budgétaire, ni fonctionnelle.
Nous regrettons :
- Une ville insuffisamment tournée vers l’avenir avec la création de parking relais, une approche saisonnière de la gestion des flux, des propositions amitieuses en lien avec la CCPEVA de plus de navettes intra-muros depuis les parkings relais ou pour connecter le haut et le bas de la ville,…
Malgré les nombreuses réunions qui ont eu lieu sur la mobilité douce, on attend toujours un réseau de pistes cyclables dignes de ce nom et qui ne reste pas à l’état de carte prévisionnel dans l’OAP thématique.
De nombreuses villes auront réussi à passer ce cap le temps d’un mandat ! Beaucoup de paroles, beaucoup de communications mais peu d’actions. Et quand les pistes sont enfin programmées, on oublie alors la nécessité de répondre aux 3 axiomes, globalité, sécurité, continuité, la présentation des travaux sur la route de la corniche en a fait la démonstration.
On apprend ensuite qu’il faut favoriser l’utilisation du train pour les actifs se rendant à Paris… : « Favoriser les modes de déplacements alternatifs à la voiture avec l’utilisation du train en particulier pour les actifs se rendant en région francilienne » !
Favoriser l’utilisation des trains, certes, mais avec quels outils ?
Et la phrase reste un peu mystérieuse puisque le nombre d’actifs se rendant quotidiennement à Genève est beaucoup plus important que celui se rendant à Paris !
Certainement un mauvais copier-coller, les documents de cadrage étant globalement les mêmes partout en France avec leur liste de bonnes résolutions et de vœux pieux.
L’agriculture
Quel dommage dans le volet agriculture de ne pas parler de la pêche professionnelle alors que cette activité est importante et présente à Evian, tant d’un point de vue économique que patrimonial. Un vrai marqueur de notre territoire.
Mais les cabinets qui rédigent ces documents sont éloignés du terrain et finalement les élus majoritaires peu être pas assez vigilants…
Etat Initial de l’environnement
De manière similaire, la pollution sonore reste à un diagnostic des années 2011 comme indiqué dans le document fourni en annexe.
Pourtant la circulation s’est très fortement intensifiée ces dernières années : quel dommage de ne pas avoir fait un nouvel état des lieux et d’être resté sur les deux seuls grands axes structurants comme étant les seuls qui sont impactant au niveau du bruit. Il suffit d’interroger les habitants pour recueillir leur vécu.
Les conséquences de cette non actualisation ne sont pourtant pas anodines, puisque cet état des lieux trop partiel ne permet pas d’en tenir compte dans le nouveau PLU qui est sensé organiser l’urbanisme de notre ville pour l’avenir. Les effets sur le bien être des habitants de cette circulation intensive n’est pas négligeable, en particulier vis-à-vis des nuisances sonores mais aussi évidemment des émissions de particules fines et autres polluants.
Ce document est complété par la liste des servitudes et les annexes. Encore une fois des documents non actualisés, comme les Annexes Sanitaire qui sont les mêmes qu’en 2016. Il aurait été pourtant intéressant de savoir combien d’habitations n’étaient pas encore raccordées en 2024 alors qu’on connait l’importance de l’assainissement pour la bonne santé de notre patrimoine commun, le Léman….
Le recensement patrimonial
Il est cependant dommage que la méthode de classement ne soit pas mieux définie : en effet des maisons au caractère indéniablement patrimonial ont été identifiées dans un premier document puis ont disparu, sans réelle explication, au profit d’autres dont la qualité architecturale interroge.
A titre d’exemples, la maison au 24 Avenue des Sources (fiche 73) qui a disparu alors que son côté patrimonial avait été retenu, ainsi que la Villa aux bois charmants (fiche 56) ou celle avenue de la Détanche (fiche 127). D’autres qui n’apparaissent pas (exemple de l’Hôtel Beau Rivage). Ou d’autres dont le caractère patrimonial est loin d’être majeur ou qui sont loin d’être représentatives d’une harmonie architecturale consensuelle (fiche 116 ou fiche 132).
La clarification des critères de choix aurait été nécessaire pour la parfaite compréhension de ces arbitrages et des explications sur les conséquences pour les propriétaires auraient dû être intégrées. Enfin, si effectivement la protection de ces constructions est nécessaire, un périmètre suffisamment large devrait être aussi indiqué pour ne pas aboutir à des aberrations comme la Villa Bellevue.
Finalement pour nous le diagnostic est imparfait, l’état initial mal actualisé et la vision manque de prospectives.
@IsabelleLang :
Tout d’abord une remarque générale :
Il est regrettable qu’au regard de l’ordre du jour de ce conseil, il n’ait pas été jugé opportun de proposer, comme cela avait été fait pour le PADD, une séance supplémentaire spécifiquement dédiée à la validation du PLU.
En effet, nous n’avons reçu l’ensemble du dossier que mardi dernier, soit :
• 24 documents relatifs au PLU,
• 9 dossiers concernant l’enquête publique.
Le délai imparti pour analyser les documents modifiés, prendre connaissance des nouveaux éléments et les retravailler s’est donc avéré extrêmement restreint. Cela nous amène à nous interroger sur les raisons ayant motivé ce choix.
D’autant que, comme l’a souligné M. le commissaire enquêteur dans ses conclusions :
• Le dossier peut sembler rébarbatif pour un public non initié,
• La consultation est alourdie par un ensemble de plus de 900 pages,
• La numérotation complexe et disparate des OAP complique leur repérage dans le règlement graphique et le livret correspondant.
Ce dernier point, que vous avez modifié, a d’ailleurs rendu notre tâche encore plus ardue, nécessitant des recherches supplémentaires pour retrouver les éléments pertinents.
Malgré ces difficultés, nous nous sommes néanmoins pliés à cet exercice imposé. Ainsi en complément des éléments exposés par Jean Guillard, voici nos observations : Le projet d’aménagement du secteur de Thony
Une concentration importante d’OAP sur ce secteur puisqu’on n’en dénombre pas moins de 10. Témoignant de l’importance que vous accordez à son aménagement dans le cadre du PLU.
Pourtant, le projet, en l’état, soulève de nombreuses interrogations.
Dès le départ, vous affirmez la nécessité de "conforter l’offre commerciale du secteur en créant de nouveaux espaces dédiés" et de "développer ou intensifier les commerces", une orientation que l’on retrouve d’ailleurs dans presque toutes les OAP.
En outre, éléments qui n’ont pas échappés à la chambre de commerce et d’industrie (CCI) lors de l’enquête et avis aux personnes publiques, puisque face à cette redondance dans quasi toutes les OAP, alerte la commune en précisant notamment :
• Sur un premier secteur, la nécessité pour la commune d’assurer la maîtrise immobilière des locaux commerciaux afin de mieux orienter leur affectation et d’éviter de fragiliser les commerces de centre-ville existants.
• Mais aussi l’importance de veiller à ne pas trop étendre les linéaires commerciaux, au risque de diluer leur attractivité au lieu de la renforcer.
• Et plus spécifiquement sur le secteur de Thony : « Nous vous recommandons de dédier les 1000 m² supplémentaires évoqué page 65 à des rez-de-chaussée « actifs » et pas seulement à du commerce au sens strict d'autant qu'il y a déjà 1000 m² de surface commerciale sur ce site »
Ces remarques, que vous vous êtes engagé devant la CCI à prendre en compte, valident en quelque sorte les réserves que nous avons exprimées dans les mêmes termes au commissaire enquêteur.
Pourtant, dans ce même document, vous avez qualifié d’emblée l’ensemble de nos observations de " Globalement des remarques/reproches sans demandes de corrections précises.", ce qui témoigne d’une certaine contradiction.
D’ailleurs, puisque nous évoquons les réponses que vous avez adressées au commissaire enquêteur et qui figurent dans le document « Enquête publique – Conclusion et avis », seront-elles également transmises à l’ensemble des contributeurs, en particulier aux habitants qui ont pris le temps d’étudier ce PLU ?
Mais fermons la parenthèse et revenons au projet « secteur de Thony ». :
Pour notre part, la création d’une nouvelle centralité à Thony, à moins de 2 km du centre-ville, risque d’aggraver la situation des commerces déjà fragilisés par une sous-fréquentation avérée.
La présentée comme un projet dédié à la population des hauts et du Pays de Gavot, est une explication simpliste car ignore la réalité actuelle en matière d’habitudes de consommation et nous le constatons tous, aujourd’hui, le consommateur est loin de prioriser les commerces de proximité.
Ainsi les impacts d’une multiplication excessive de l’offre risquent d’induire :
• Une déstabilisation susceptible de nuire à la viabilité des commerces existants.
• Une concurrence économique néfaste entre deux pôles commerciaux.
• Un impact négatif sur l’économie locale, avec un risque accru de fermeture rapide des commerces nouvellement implantés, entraînant la création de friches commerciales et une perte d’attractivité.
Vous vous basez sur un sondage des habitants du quartier pour justifier cette orientation. Cependant, les limites de ce type d’approche sont bien connues : la composition du panel, la formulation des questions et le taux de réponse (ici inférieur à 10 %) ne permettent pas d’en tirer des conclusions réellement objectives.
S’il est indéniable que ce secteur, avec ses équipements spécifiques (stade, maison des associations, école de musique, etc.), peut effectivement faire l’objet d’un développement en tant que pôle secondaire d’activités, mais l’y consacrer à l’implantation de nouveaux commerces nous semble une erreur stratégique.
Le second point majeur de préoccupation de ce projet, concerne les modifications des voies de circulation
liées à la création de ce pôle.
Or cette réorganisation des voies de circulation est contestable.
Vous proposez de détourner la circulation de l’avenue de Thony (axe de niveau 1, destiné à assurer les liaisons à grande échelle entre les quartiers des hauts d’Évian et le centre-ville) vers la route du Golf (axe de niveau 2, conçu pour des liaisons internes et non pour le trafic de transit).
Nous vous avons déjà alerté sur l’incohérence de ce choix à plusieurs reprises, notamment lors du conseil municipal du 28 novembre 2023 et en commission sécurité. Car ce détournement engendrerait des problèmes évidents :
• Un risque accru de congestion sur la route du Golf, dont les infrastructures ne sont pas adaptées à un tel flux de circulation.
• Une dégradation de la sécurité routière, avec un danger accru pour les piétons et cyclistes sur cet axe plus petit.
• Un impact négatif sur l’environnement et la qualité de vie des riverains, en raison d’une hausse de pollution sonore et atmosphérique.
Vous affirmez avoir réalisé une étude de trafic, origine/destination et rabattement des flux de transit vers la RD et les voiries de catégorie 1.
Pourtant, malgré nos demandes, nous n’avons toujours pas eu accès aux résultats de cette étude.
De plus, il ne semble pas, concernant ce projet de détournement, qu’un recueil d’avis des habitants du secteur de la route du Golf et de la route de Bissinges ait été mené. Pourtant, les conséquences pour les riverains sont loin d’être négligeables.
En définitive, cette vision d’aménagement est incohérente. Alors que vous mettez en avant une volonté d’apaisement de la circulation, ce projet aboutit en réalité à une surcharge d’un axe plus petit, sans véritable réflexion d’ensemble.
Le PLU doit proposer une vision cohérente et globale de l’aménagement du territoire. Or, le projet d’aménagement du secteur de Thony, en l’état, ne répond pas à cette exigence. C’est pourquoi nous ne pouvons le valider tel quel.
Point sur les OAP :
Dans ce PLU, il a été décidé d’intégrer un nombre particulièrement élevé d’OAP.
Certes, les OAP sectorielles constituent un outil pertinent pour encadrer l’urbanisation en définissant des orientations et des règles d’aménagement adaptées aux spécificités locales et par extension améliore la maîtrise du développement urbain.
Cependant, leur nombre important suscite des interrogations, d’autant plus que leur présentation manque parfois de clarté. Cela est particulièrement frappant dans la partie haute de la ville, où l’accumulation des OAP complexifie le PLU et le rend difficile à appréhender, comme l’a relevé le commissaire enquêteur.
De plus, l’absence de coordination entre certaines OAP pourrait engendrer des incohérences, des difficultés de mise en œuvre et des coûts supplémentaires. Leur interdépendance accrue accentue également le risque de blocages et de décisions arbitraires, posant un réel défi en matière de gestion et de planification.
Par ailleurs, il est important de rappeler qu’au sein d’une OAP, le règlement peut fixer des normes spécifiques à l’échelle de la zone (implantation, hauteur, etc.), pouvant parfois déroger aux règles générales du PLU. Par exemple, en matière de hauteur, c’est la moyenne finale qui prévaut.
Ainsi, la multiplication des OAP pourrait entraîner des dérives si les futurs responsables de l’urbanisme ne font pas preuve d’une vigilance absolue. Une approche plus cohérente et lisible aurait donc été essentielle pour garantir une urbanisation maîtrisée et transparente.
Surtout que certaines manquent de cohérences de précision ou présentes des contradictions. En voici quelques exemples :
1. Entrée de ville Ouest : Dans la première version, il était question de la « démolition » d’un garage considéré comme « à l’abandon ». Dans la version actuelle, les termes ont été remplacés par « déménagement / restructuration », tout en maintenant l’intention de renaturer le site. Cette approche crée une ambiguïté, d’autant plus que le lieu a été transformé depuis plusieurs mois en galerie d’art. Les principes de cette OAP auraient pu être revus pour mettre l’accent sur la préservation du bâtiment qui a déjà fait l’objet d’une requalification.
2. Octroi avenue de la Gare Sud : Pourquoi avoir dissocié cette zone de l’OAP Octroi avenue de la Gare Nord, alors qu’elles appartiennent au même secteur et poursuivent des objectifs quasi identiques ? De plus, elle est décrite comme un « site stratégique entre la ville basse et la ville haute », mais sans explication détaillée. Une clarification supplémentaire aurait été utile pour mieux comprendre la portée de cette notion de « stratégique ».
3. Boulevard du Bennevy : La construction d’un nouveau collectif entraîne la disparition d’un espace de verdure dans une zone déjà dense. Cette décision semble en contradiction avec la volonté affichée de préserver l’activité d’un hôtel touristique voisin. (page 31)
4. Le clou sud : Dans l’exposé que vous venez de nous faire vous dites « Nous avons également reclassé en zone Agricole les secteurs « Chez Viollaz », « Au clou Sud » et « Aux tours Ouest » » conformément aux recommandations de la DDT.
Or sauf erreur de notre part dans le livret des OAP, cette zone est toujours prévus comme site visant à accueillir des constructions de type pavillonnaire (Page 89) ?
5. Route de la Corniche : Une nouvelle voie débordant de cette OAP, est prévue à travers des propriétés privées adjacentes, alors que ces dernières disposent déjà d’un accès sur la route de la corniche. Cette disposition est pour le moins surprenante vue la typologie du secteur (sortie sur un accès privé prévu voir flèche sur la carte page 86)
Concernant les OAP thématiques :
• OAP Trames Verte, Bleue et Noire : L’importance des haies champêtres plutôt que des clôtures est soulignée, avec une préférence pour des clôtures perméables si nécessaires. Toutefois, il est regrettable que l’objectif d’augmenter la part du végétal dans les projets urbains n’ait pas été respecté lors de la rénovation de l’esplanade du casino, qui aurait dû être exemplaire en la matière.
• OAP Mobilité : Bien qu’elle présente des aménagements de carrefours et des maillages cyclables et piétons, cette OAP manque de concrétisation sur le terrain, hormis quelques aménagements symboliques.
• OAP Commerces et Artisanat : La centralité de Thony est réaffirmée, mais avec une approche très théorique et déconnectée de la réalité. Des projets comme la transformation de la Buvette Novarina- Prouvé en lieu gourmand ou la Rue de la Touvière en espace de bien-être apparaissent futuristes mais sans réelle base concrète. Il est regretté que ces initiatives ne reposent ni sur une vision globale ni sur une concertation avec les acteurs locaux, donnant l’impression d’une collection d’intentions plus séduisantes que pragmatiques.
Quelques remarques concernant le règlement écrit
Document central, qui régit les règles zone par zone.
Nous nous étonnons que les règles qui sont communes n’aient pas été rassemblées.
Le fait de les re-détailler pour chaque zone rend le document lourd à lire et à vérifier. Il est en effet difficile de contrôler précisément les 237 pages et de voir si pour chaque zone la règle est effectivement la même que pour les autres.
Quel est l’intérêt de cette complexification ?
Ceci étant, nous approuvons l’interdiction des cuisines dédiées à la vente en ligne, sources de nuisances et de conflits dans beaucoup de villes.
Les nouvelles règles de stationnement sur les nouveaux immeubles vont dans le bon sens en indiquant que « la moitié des places de stationnement créées devront être végétalisées et perméables ». Mais pourquoi ne pas avoir été plus loin, en demandant 100 %, dans le contexte environnemental actuel ?
Concernant les hauteurs, aucune modification n’a été apportée par rapport au PLU précédent, ce qui est regrettable au vu de l’enjeu majeur de densification.
L’augmentation des hauteurs dans certaines zones ciblées, comme l’avenue de la Gare côté sud, aurait permis de concilier densification et limitation de l’étalement, tout en préservant les cônes de vue. Cet élément permettant aussi de conserver des espaces naturels supplémentaires.
À l’inverse, maintenir des hauteurs limitées conduit inévitablement à une multiplication des constructions pour atteindre les objectifs de densification.
On observe ici la même absence d’anticipation que dans le PLU précédent, dont le quartier des hauts a subi les conséquences : en l’absence d’une stratégie adaptée, le secteur a connu une prolifération de petits immeubles ces deux dernières années, modifiant son équilibre urbain.
Enfin, s’agissant des Emplacements Réservés, bien que la liste soit désormais complétée par un atlas, elle manque encore de précisions quant aux affectations exactes de ces emplacements.
De façon générale, les documents de ce PLU sont nombreux, touffus, souvent redondants, mais les précisions manquent.
En conclusion
Nous reconnaissons le travail réalisé sur cette révision du PLU, qui apporte effectivement des améliorations par rapport à la version précédente au quelles nous souscrivons effectivement.
Cependant, nous avons constaté de nombreuses imperfections, notamment des diagnostics incomplets, l’oubli de certains enjeux majeurs et l’absence de mise à jour de documents essentiels, en particulier sur le climat et les nuisances sonores.
Des omissions surprenantes pour un document censé encadrer l’avenir urbain de la ville. Dans ces conditions, comment établir des projections fiables sur l’évolution du territoire et prendre des décisions adaptées aux défis environnementaux et de santé publique ?
Par ailleurs, la présence d’un grand nombre d’OAP, dont certaines souffrent d’incohérences et manque de vision globale, comme expliqué dans cet exposé, risque de complexifier l’application du PLU et pourrait non seulement entraîner des difficultés d’interprétation et de mise en œuvre pour les élus, aménageurs et habitants, mais aussi fragiliser sa légalité et ouvrir la voie à des contestations ou recours, retardant ainsi le développement de la commune et des projets.
Au regard de ces réserves nous ne pouvons le valider en l’état
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